Ne jamais trop se fier à ses sens…
- Luc Thibert
- 6 avr.
- 2 min de lecture
«Héraclite qualifiait l'auto-illusion de terrible maladie et la vue de sens menteur.»
-Diogène Laertius
Vies et opinions d'éminents philosophes, 9.7
Nous nous entendons pour dire que la conscience de soi est la capacité de s’auto-évaluer objectivement. C’est l’aptitude à remettre en question nos propres orientations, nos schémas et nos hypothèses. L’oiêsis — cette auto-illusion, ou plutôt cette opinion souvent arrogante, vaniteuse et jamais remise en cause — exige que nous soumettions chacune de nos conclusions à un examen rigoureux. Car même nos yeux, parfois, peuvent nous tromper.

Nous sommes témoins d’une situation. Nous l’observons d’un coup d’œil rapide, et aussitôt, nous portons un jugement. Le verdict semble sans appel, car nous sommes convaincus d’avoir bien analysé ladite situation. Pourtant, un grand nombre de variables nous échappent : nous n’avons utilisé que certaines pièces à conviction, que nous avons ensuite plaquées sur notre propre tableau de valeurs, sur nos expériences passées, et sur les prémices de notre éducation. Résultat : notre jugement peut, fort probablement, être erroné.
D’un côté, cela peut sembler inquiétant. Je ne peux même pas faire confiance à mes propres sens ! Oui, on peut voir les choses ainsi. Mais on peut aussi les voir autrement : puisque nos sens nous trompent parfois, que nos émotions sont souvent trop intenses et alarmistes, que nos projections sont fréquemment trop optimistes… eh bien, cette conscience même devient une force. Elle nous enseigne à ne pas tirer de conclusions hâtives.
Rien ne nous empêche de faire une pause, de ralentir le rythme et de prendre calmement conscience de tout ce qui se joue. Et, une fois tous les éléments bien considérés, de prendre une décision. Une décision éclairée. Rationnelle.
Selon les stoïciens, ce temps d’arrêt est une habitude inestimable.
(Une habitude qui se développe.)
Luc Thibert
Inspiré du Daily Stoic du 7 mars.
Tout cela me parle directement. Même que ça crie fort. On me dit souvent que je sais lire les gens. Je le prends comme un compliment - nous en avons tellement besoin. Mais en réalité, je juge plus que je ne lis. C'est que tout de quelqu'un m'intéresse. Je regarde, j'écoute, je perçois un tas de choses. Jusque-là, ça va encore. Ce qui manque cruellement à mon expertise, c'est le fameux recul ! Ce recul nécessaire , ce silence de la pensée, cet oubli des détails remarqués qui ne veulent peut-être bien rien dire du tout. Même chose en ce qui me concerne. Je ne connais personne par coeur, ni moi-même. Je ne connais pas les années de l'autre, je…